La Commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, qui regroupe des représentants de tous les partis représentés dans l’hémicycle, vient de désigner au Conseil supérieur de l’AFP un député du Rassemblement national, M. Bruno Bilde. Cette nomination a créé un fort émoi parmi le personnel de l’Agence et, au-delà, dans une bonne partie de la profession.
En désignant M. Bilde comme représentant de l’Assemblée nationale au Conseil supérieur de l’AFP, organisme chargé notamment de veiller au respect du statut de l’Agence, les membres de la Commission des affaires culturelles ont fait un choix d’orientation contre le statut de l’AFP.
Ce député RN du Pas-de-Calais s’illustre en effet depuis toujours par son hostilité envers l’indépendance et la liberté des journalistes. Ce ne sont pas les confrères de la Voix du Nord, victimes de ses pressions, diatribes et procédures baillons à répétition, qui diront le contraire. Ni ceux de l’AFP et d’autres rédactions qui ont déjà eu affaire à de nombreuses reprises à ces mêmes intimidations. M. Bilde fait aussi partie de ceux qui s’en sont pris à l’AFP pour sa couverture du conflit israélo-palestinien. Comme son parti, il est partisan de la privatisation du service public de l’audiovisuel.
Selon, les représentants du NFP à la Commission des Affaires culturelles, cette nomination serait « un moindre mal » car le Conseil supérieur de l’AFP ne prend pas de « décisions stratégiques » et qu’il « faut bien se partager les sièges à la proportionnelle des groupes de l’Assemblée ». Fallait-il laisser les mains libres à ce gouvernement minoritaire pour qu’il puisse donner un tel gage au RN en échange de son soutien, et avoir les mains libres pour décider du futur de l’AFP ?
Les journalistes ne sont pas dupes. Il s’agit donc une nouvelle fois de s’en prendre au statut de l’AFP.
Depuis de longues années, ce statut, garantissant l’indépendance de l’AFP et l’accomplissement de sa mission d’intérêt public, a été dans le collimateur des gouvernements successifs, de gauche comme de droite, relayés par la Commission européenne, et les privatiseurs de tout poil. Pour eux, le financement partiel de l’AFP par une dotation d’Etat, tout en restant indépendante du pouvoir politique ou des
intérêts privés, est quelque chose d’insupportable et ils n’ont eu de cesse de vouloir la réduire. Que ce soit au nom des politiques austéritaires de baisse des dépenses publiques ou de la « concurrence libre et non faussée ».
Malgré leurs tentatives successives, et grâce à la mobilisation des salariés qui en ont d’ailleurs payé le lourd tribut, le statut de l’AFP a été préservé. Affaibli certes, mais préservé.
Ce statut, dont le Conseil supérieur est le garant, fait obligation à l’AFP de maintenir de par le monde un réseau journalistique lui permettant de produire de manière continue « une information, exacte et digne de confiance » sur la base des faits. Il garantit aussi que l’AFP ne puisse passer « sous le contrôle de droit ou de fait d’un groupement idéologique, politique ou économique. »
A l’heure où l’information est de plus en plus livrée aux intérêts financiers et politiques d’une oligarchie, l’AFP donne encore aux citoyens l’accès au quotidien à une information pluraliste basée sur des faits, permettant l’exercice de la démocratie.
FO, syndicat indépendant de l’Etat et des partis, représentés ou non à l’Assemblée nationale, ne laissera donc personne s’en prendre une nouvelle fois au statut de l’AFP.
Et pour commencer, il exige le maintien du réseau international de l’AFP : maintien de la direction régionale de Nicosie, en charge de la couverture du Moyen-Orient, maintien du statut et du nombre de journalistes expatriés.
Paris, le 11 octobre 2024
