Vente du Parisien à LVMH

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Le mouvement de concentration s’accélère dans la presse et fait peser les plus lourdes menaces sur l’emploi et les conditions de travail des salariés de ce secteur.

Après « les Echos », « le Figaro », « le Monde », le groupe l’Express, « Libération »… C’est au tour du Parisien de tomber dans l’escarcelle d’un capitaine d’industrie et de la finance alors que ce quotidien (avec « Aujourd’hui en France ») appartient jusqu’en octobre à un groupe indépendant (le groupe Amaury).Motion parisien 001

Après plusieurs années d’une politique de restructuration et d’économies menée sur le dos des salariés par le groupe Amaury afin de « sauver le journal », disaient-ils, la vérité crue apparaît au grand jour : il s’agissait de rendre la mariée plus belle pour la mettre sur le marché.

Plan de suppression d’emplois suivi d’une baisse des effectifs au fil de l’eau, blocage des salaires sur plusieurs années, baisse drastique des indemnités kilométriques, remise en cause de la convention collective des employés et cadres de presse par la mutualisation des fonctions dites support… Toute une panoplie a été déployée par le futur ancien actionnaire pour rendre le Parisien vendable. Une première tentative de mise sur le marché avait avorté en 2011 faute de candidats.

Dans le cadre de cette politique d’ensemble, la direction changeait le statut juridique du Parisien, le faisant passer de SNC (société en nom collectif) en SAS (société par actions simplifiée). Un accord était trouvé avec les services fiscaux : une vente ne devait pas intervenir avant le 1er janvier 2016 sous peine de voir les impôts fortement augmenter. Aujourd’hui, le groupe Amaury est prêt à se débarrasser du Parisien à l’automne, quitte à payer de 6 à 10 millions d’euros d’impôts supplémentaires… Les salariés qui n’ont pas eu d’augmentation depuis plusieurs années apprécieront !

LVMH, qui possède déjà « les Echos », Radio Classique et « Connaissance des arts », est donc entré en négociation exclusive avec le groupe Amaury. Seraient vendus : « le Parisien »-« Aujourd’hui en France », « le parisien Magazine », la régie publicitaire, les sociétés de messagerie et de portage propriétés en totalité ou en partie du Parisien, l’imprimerie de Saint-Ouen. Or cette imprimerie est destinée à être fermée par les actuels propriétaires, et ce avant la vente. De plus, le groupe Amaury continuera à moyen terme à posséder des imprimeries destinées aux quotidiens. Dans le scénario imaginé par les deux groupes, les journaux de LVMH seront complètement tributaires d’Amaury et/ou d’autres imprimeurs pour sortir ses journaux. Ce qui fait peser un vrai risque sur le Parisien-Aujourd’hui et ses horaires de bouclages tardifs (notamment pour les éditions départementales). Et il y a d’abord la casse sociale induite par cette fermeture avec 65 suppressions de poste en CDI, sans compter les permanents (ouvriers imprimeurs ou du départ payés à la vacation mais dont c’est le travail régulier).

Dans l’autre sens, le groupe Amaury sera tributaire de LVMH qui devient propriétaire de la régie publicitaire Amaury Médias. Et c’est là d’ailleurs qu’on touche le cœur des motivations du groupe de luxe. En effet, Francis Morel, le patron de la branche médias de LVMH, déplore depuis des années la faiblesse de la régie des Echos pour commercialiser les produits du groupe ou d’autres marques. L’arrivée chez LVMH d’un porte-avions tel qu’Amaury Médias devrait multiplier la puissance de feu commercial du groupe de Bernard Arnault… Et fait craindre des économies d’échelle, avec suppressions de postes à la clef, chez les salariés des deux régies publicitaires.

Ce projet de vente bien avancé a été présenté à un comité d’entreprise extraordinaire le mardi 26 mai. Les organisations syndicales appelaient à une assemblée générale de tout le personnel le jeudi 28 mai. Le SGJ-FO, qui a été à l’initiative de la motion de l’AG, fait de ce texte la colonne vertébrale de son action face aux directions et aux côtés des salariés dans la période qui s’ouvre.

Mais l’action syndicale ne s’arrête pas pendant la cession, bien au contraire : les revendications demeurent et demeureront, que ce soit avec les futurs anciens propriétaires ou avec les nouveaux pressentis. Le syndicat veille et veillera au respect des principes professionnels qui régissent notre profession et qui sont garantis en grande partie par les accords que nous avons signés. Le SGJ-FO réclame et réclamera les postes nécessaires pour la sortie d’un journal de qualité dans de bonnes conditions de travail, notamment au pôle image et au supplément éco. Il a demandé 2 % d’augmentation des salaires lors de la dernière réunion de négociation annuelle obligatoire qui s’est tenue le 22 mai.